Quels sont les premiers habitants de la Palestine ?
La Palestine est une région au carrefour de civilisations anciennes. Son histoire remonte à plusieurs millénaires, et de nombreux peuples s'y sont installés, influençant son développement culturel et politique. Qui étaient les premiers habitants de la Palestine ? Quels peuples ont marqué son histoire avant l’arrivée des grandes civilisations ? Cet article explore les origines des populations palestiniennes en s’appuyant sur des recherches archéologiques et historiques. Il est essentiel de souligner que, malgré les nombreux changements de populations et d’influences extérieures, la présence des Arabes musulmans a été constante à travers les âges.
1. Les premiers peuplements de la Palestine préhistorique
a) La Préhistoire et les premières traces humaines
Les premières traces de présence humaine en Palestine remontent au Paléolithique (environ 1,4 million d’années). Des outils en pierre retrouvés sur plusieurs sites, comme ceux de la vallée du Jourdain et du Mont Carmel, attestent de la présence d’hominidés.
Durant le Néolithique (vers 10 000 av. J.-C.), la région connaît une révolution agricole. Les communautés commencent à s’organiser en villages, comme en témoigne le site de Jéricho, l’une des plus anciennes villes du monde. Jéricho, occupée de façon continue depuis plus de 11 000 ans, abrite des vestiges impressionnants, notamment une tour en pierre de plus de 8 mètres de haut, datant d’environ 8000 av. J.-C.

Ces premières populations développent l’agriculture, la domestication des animaux et des pratiques funéraires complexes. Le site de Beidha, proche de Petra, témoigne également de la présence de villages organisés dès 7200 av. J.-C.
2. L’Âge du Bronze et les premières civilisations cananéennes
a) Les Cananéens : les premiers habitants historiques
Les premiers peuples historiquement attestés en Palestine sont les Cananéens. Ce groupe sémitique s’y installe autour de 3000 av. J.-C. Ils développent une culture avancée, avec des cités-États comme Jéricho, Megiddo et Gaza. Leur langue, apparentée à l’hébreu et au phénicien, est l’ancêtre de plusieurs langues modernes de la région.
Les Cananéens pratiquent le commerce et établissent des contacts avec l’Égypte et la Mésopotamie. Des tablettes d’argile retrouvées à Ugarit montrent des échanges commerciaux et diplomatiques entre la Palestine et ces grandes civilisations.
b) Les influences égyptiennes et mésopotamiennes
À partir du IIe millénaire av. J.-C., la Palestine passe sous influence égyptienne. Les pharaons y établissent des garnisons et contrôlent le commerce. Des textes retrouvés, comme les lettres d’Amarna (XIVe siècle av. J.-C.), témoignent des relations diplomatiques entre les rois cananéens et l’Égypte.
Parallèlement, les Amorrites et les Hittites exercent aussi une influence sur la région, entraînant des conflits et des changements dynastiques dans les cités-États cananéennes.
3. L’Âge du Fer : l’arrivée des Hébreux, des Philistins et la continuité arabe
a) L’émergence des premiers royaumes israélites
Vers le XIIe siècle av. J.-C., la région connaît des bouleversements majeurs avec l’effondrement de l’Empire hittite et le déclin de l’Égypte. C’est durant cette période que des tribus israélites s’installent en Canaan, formant les bases des royaumes d’Israël et de Juda. La Bible relate leur arrivée et la conquête de Canaan sous la conduite de Josué, bien que les preuves archéologiques suggèrent une intégration progressive plutôt qu’une invasion brutale.
b) Les Philistins : un peuple venu de la mer
Au même moment, les Philistins s’implantent sur la côte sud de la Palestine, notamment dans les villes de Gaza, Ashdod et Ashkelon. D’origine indo-européenne, ils font partie des « Peuples de la mer » et rivalisent avec les Israélites pour le contrôle du territoire.
Les Philistins apportent des avancées culturelles et technologiques, notamment dans la métallurgie et l’urbanisme. Leur présence est attestée par de nombreux vestiges archéologiques, qui montrent des influences mycéniennes dans leur art et leur architecture.

c) La présence arabe et musulmane à travers l’histoire
Dès l’Antiquité, les peuples arabes sont présents en Palestine. L’un des premiers témoignages de cette présence remonte à l’époque des Nabatéens (IVe siècle av. J.-C. – IIe siècle ap. J.-C.), un peuple arabe qui contrôle des routes commerciales reliant l’Arabie à la Méditerranée.
Avec la conquête musulmane du VIIe siècle, l’islam s’enracine profondément dans la région, et la population arabe devient majoritaire. Contrairement à une idée reçue, les Arabes musulmans ne sont pas des envahisseurs venus d’ailleurs, mais font partie intégrante de l’histoire de la Palestine depuis des millénaires.
Sous les Omeyyades (661-750), la Palestine devient un centre politique et religieux majeur avec la construction du Dôme du Rocher à Jérusalem. Sous les Abbassides (750-1258), elle continue de prospérer en tant que carrefour commercial et culturel.
La présence arabe se renforce encore sous les Ayyoubides et les Mamelouks, qui contrôlent la région avant l’arrivée des Ottomans au XVIe siècle. L’administration ottomane, qui dure quatre siècles (1516-1917), maintient une population majoritairement arabe, avec une forte influence islamique sur l’architecture, la culture et la vie sociale. En témoigne l'apparition de bijoux d'inspiration arabe, aujourd'hui appelés bijoux palestiniens, tels que les bracelets, les colliers ou encore les bagues à calligraphie arabe.

d) La continuité de l’identité arabe palestinienne
Contrairement à certaines affirmations, la Palestine n’a jamais été une terre vide ou exclusivement peuplée par des étrangers. Tout au long de l’histoire, sa population a été principalement arabe, avec une coexistence de diverses communautés. Les Ottomans, les Croisés, les Byzantins et d’autres puissances ont certes influencé la région, mais les Arabes musulmans y ont toujours constitué une majorité significative.
Même après la colonisation britannique et les événements du XXe siècle, l’identité arabe palestinienne reste profondément ancrée. La culture, la langue, et les traditions palestiniennes témoignent de cette continuité historique. La revendication d’un peuple autochtone arabe en Palestine ne repose pas sur une idéologie moderne, mais bien sur une réalité historique qui traverse les siècles, en témoigne la persistance de la symbolique du keffieh palestinien, apparu vraisemblablement dès le 7è siècle.

Conclusion
Les premiers habitants de la Palestine sont issus d’un mélange de peuples aux origines diverses : préhistoriques, cananéennes, sémitiques et indo-européennes. Mais un fait demeure : la présence arabe et musulmane est une constante dans l’histoire de la région, et ce, bien avant la période moderne. Cette diversité a façonné l’histoire de la Palestine, en faisant un carrefour de civilisations dès les premiers âges de l’humanité. Aujourd’hui encore, l’héritage de ces peuples anciens se reflète dans l’identité culturelle et historique de la Palestine.
Références
« Une histoire de la Palestine » – Jean-Pierre Filiu
« The Archaeology of Ancient Israel » – Amihai Mazar
Recherches de l'Institut d'archéologie de l'Université hébraïque de Jérusalem